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Presque Réelles

France, 2017-2018

« Leur première rencontre a eu lieu sur Internet. Pas besoin de longs discours, c’est au travers de l’écran que tout s’est joué. La créature affichait un air candide, une peau sans défaut, une coiffure tirée à quatre épingles. Et puis, il y avait ces seins, beaux, ronds, l’air soyeux et toujours disposés aux caresses.
Le jour où elle est arrivée, elle attendait sur le perron qu’on vienne l’accueillir. Son nouvel ami l’a prise dans ses bras, l’a soulevée, comme on porte une jeune mariée. Une fois installée sur le canapé, un verre de champagne à la main, elle s’est vu offrir des vêtements, des bijoux, quelques ensembles un peu coquins. Elle a été couverte de cadeaux.
Il a fallu immortaliser cet instant par une photo, pour que l’on se rappelle du jour où elle est arrivée à la maison et où leur histoire d’amour a vraiment pris un autre tournant. Pourtant, ce n’est pas une image qui a été partagée sur les réseaux sociaux. Ce n’est pas facile, de parler de ce genre de relation : un homme, qui aime une poupée, ce n’est pas courant.
Elles s’appellent Erena, Carole ou encore Estelle. Des prénoms somme toute assez classiques, qui ont l’avantage de plaire à leur partenaire, puisque ce sont eux qui les ont choisis. Elles mesurent entre 1m50 et 1m75 et pèsent jusqu’à 45kg. Elles ont en commun des formes de Vénus, une peau douce et lisse. Inerte, aussi. Pas de pulsation, puisque pas de coeur. Mais ce n’est pas cela qui empêchent leur propriétaire de se dire réellement amoureux.
Ces hommes, ce sont Etienne, Thomas ou encore Michel. Ils portent des prénoms somme toute assez classique, ce sont des hommes au destin plutôt banal. Ils ont tous une histoire différente qui les a amenés à franchir le pas : certains ont perdu leur compagne après une longue romance, d’autres ont souffert d’une grande solitude. Certains n’y voient qu’un fantasme, pur et simple. Un fantasme sexuel, mais pas toujours. La poupée leur permet alors de se sentir moins seul, de regarder à deux la télévision ou de prendre le petit-déjeuner en face de quelque chose, qui ressemble à quelqu’un. »